Gars bisexuel et polysexuel, pair aidant et éducateur en sexualité

Réalisé avec le soutien du programme Champions communautaires et de RÉZO.

Ceci est une version censurée de l’article; elle contient quand même du langage cru par rapport au sexe. La version originale contenant plusieurs images sexuellement explicites se trouve ici .

La question « est-ce que je suis bi? » revient toujours dans les espaces bisexuels et LGBTQ+ sur l’internet et il existe à peine de ressources sur le sujet en français. Quand tu te donnes la peine d’aller sur le Net pour demander ça, tu veux bien entendu une réponse, mais tu veux aussi qu’un autre être humain te dise : « moi aussi, mec, je suis passé par là. » C’est normal de vouloir un sentiment de connexion et de vouloir entendre d’autres personnes te dire ce qu’elles pensent de ton expérience par rapport à la bisexualité ainsi que la leur. Ça prend beaucoup de courage pour finalement oser poser cette question tout haut.

Dans cet article, je vais te donner la meilleure réponse que je peux à cette grosse question qui ne soit pas de la bullshit. Ce n’est pas une réponse simple, mais j’espère que tu pourras te reconnaître dans tout ça. Il y a toutes sortes de parcours qui peuvent amener un gars à se demander s’il est attiré par plus d’un sexe/genre. Il y a des gars qui commencent à se poser cette question après avoir cru pendant longtemps qu’ils n’étaient qu’aux femmes. D’autres gars peuvent s’être identifiés comme gai pendant un bout de temps avant de se rendre compte qu’il y a plus à leur sexualité que ça. D’autres réalisent dès le départ qu’ils sont attirés par des gens, peu importe leur sexe ou leur genre. C’est difficile de faire le tour de toute la gamme des expériences que tout ça représente, mais je vais tenter ma chance malgré tout.

Remettre en question ta sexualité : des fantasmes à la réalité

Si tu remets en question ta sexualité, c’est que quelque chose qui a déclenché ton questionnement. Si t’es jeune, peut-être que tu découvres ta sexualité et que tu fantasmes sur un trip à trois avec ton meilleur chum de gars et sa blonde, ou bien il y a tant des personnes non-binaires (ce sont de plus en plus de gens qui osent dire être d’un autre genre que femme ou homme) que des gars et des filles qui te font tripper. Si tu te croyais hétéro, peut-être que t’es tombé sur de la porn gaie sur internet et que ça t’a excité; ou tu t’es saoulé avec un ami de gars avec qui t’as fini par te retrouver au lit et tu ne peux t’arrêter d’y repenser. Si tu te voyais comme gai, peut-être que tu te découvres une fascination pour les parties chaudes des corps de personnes d’autres genres; ou t’as couché avec une de tes potes bi ou lesbienne et t’as réalisé à quel point le sexe hétéro te manquait; ou peut-être qu’après des années à être fous des mecs, tout d’un coup tu te retrouves obsédé par les femmes ou par quelqu’un de non-binaire. D’habitude, remettre en question ta sexualité, ça commence par des fantasmes, par ce qui se passe dans ta tête.

Source: Flickr

Tout d’abord, il y a une différence entre les fantasmes et la réalité et c’est une constatation que plusieurs personnes finissent par faire. Des fois, des gens ont un fantasme mais découvrent qu’ils n’aiment pas ça quand ils l’essaient dans la vraie vie; à ce moment, ils décident de s’en tenir au fantasme seulement. Un gars gai fini par baiser avec sa chum de fille et se rend compte que ce qui l’excitait dans ses fantasmes ne se passe pas comme ça dans la réalité. Ou bien il apprend qu’il aime les seins d’une femme cisgenre (cisgenre veut dire être en accord avec le diagnostic de son docteur sur son genre à la naissance, par opposition à être transgenre) ou d’un-e pote non-binaire (plusieurs gars trans ont aussi des seins, mais la plupart d’entre eux n’ont pas envie qu’on les désire à cause de ça), mais pas ce qu’il y a en dessous de la ceinture. Le gars straight qui aime la porno gaie suce un gars pour la première fois et conclut que ce n’est pas pour lui. Ou il se rend compte qu’il est prêt à se faire sucer par ou à topper un gars « plus féminin » (j’en parle comme ça parce que beaucoup de gars découvrant leur bisexualité en parlent comme ça; on pourrait avoir une longue conversation sur les stéréotypes de genre et les rôles sexuels…), mais rien d’autre. Si tu te reconnais dans ces expériences, t’as besoin de savoir que c’est correct de fantasmer sur quelque chose que tu n’aimes pas dans la réalité. Les attirances et les actes sexuels que t’aimes dans la vraie vie peuvent être différents des fantasmes dans ta tête où tout se déroule exactement comme tu veux.

En parlant de porn

Il y a plus d’hommes (et de femmes) hétéro qu’on pense qui regardent de la porno gaie. Soyons honnêtes : la porn hétéro typique peut être poche. Beaucoup de personnes trouvent que que la porn gaie est plus l’fun, que les acteurs ont l’air d’avoir plus de plaisir et que le sexe ressemble plus au sexe de la vie de tous les jours. Aussi, certains gars straight sont excités par des aspects bien précis du sexe entre deux hommes. Peut-être qu’ils aiment regarder un homme ramoner quelqu’un, peu importe le sexe ou le genre de cette personne. Peut-être qu’ils aiment le côté masculin de la chose ou bien le contraire : ils aiment voir un garçon « plus féminin » (encore une fois, stéréotypes de genre et rôles sexuels…) sucer une queue ou se faire baiser par derrière. Peut-être qu’il y a un côté de domination qu’ils aiment. Les possibilités sont infinies et ce sont souvent les petites choses qui alimentent un fétiche. Si tu te rends compte que t’aimes la porno gaie même si t’es hétéro, jette un coup d’oeil à r/TotallyStraight [sexuellement explicite – en anglais] sur Reddit. De même, plusieurs hommes bisexuels se concentrent plus sur la porn gaie qu’hétéro pour les mêmes raisons – ils trouvent que la porno straight est plus artificielle et qu’elle ne reflète pas leurs expériences hétérosexuelles.

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Quand t’es trans, non-binaire ou les deux et que tu te questionnes sur ta sexualité

Maintenant, ce serait injuste de parler d’être attiré par plusieurs genres sans parler du vécu des gars trans et des gars non-binaires (deux catégories qui peuvent se chevaucher) à ce sujet, dont tu fais peut-être partie. Je suis cisgenre, donc je ne suis pas la meilleure personne pour parler de ce sujet. Mais près du tiers des personnes trans [en anglais – LGBTmap] sont bisexuelles ou pansexuelles; il y a beaucoup de recoupements entre les réalités trans et les réalités bi, pan et polysexuelles. Je n’ai pas de stats spécifiquement pour les gars trans ni pour les gars non-binaires, mais de manière anecdotique, je peux aussi te dire que plusieurs d’entre eux sont bisexuels, polysexuels ou pansexuels. Ayant parlé avec des ami-es de leur transition médicale (que tant des personnes trans que non-binaires peuvent entreprendre, ou non), c’était courant pour eux d’avoir des changements dans leurs sentiments en lien avec la sexualité après avoir commencé le traitement hormonal, autant sur le plan de comment ils ressentaient ces sentiments que sur le plan des personnes qui les attiraient. Si tu commences un traitement hormonal de substitution (THS), tu pourrais commencer à être attiré par des personnes d’un genre auquel tu n’étais pas attiré avant. Plus rarement, tu pourrais arrêter d’être attiré par un genre (ce qui peut être vraiment poche si tu avais un-e partenaire quand t’as débuté ta transition). Des fois, il n’y a aucun changement et tu restes attiré par le ou les même(s) genre(s) post-THS que pré-THS. La transition est un moment de découverte de ta sexualité qui peut être excitant, mais ça peut aussi te causer de la confusion ou t’inquiéter. Tu voudras peut-être parler à d’autres personnes trans de ce sujet; le couvert du pseudonymat sur internet [forum anglais sur Reddit] peut rendre ça plus facile, vu que ce sont des questions personnelles pour beaucoup de gens. Leur perspective sera aussi meilleure que la mienne.

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Le sexe, c’est compliqué et l’identité, c’est complexe

Au-delà des fantasmes, tant la sexualité que le sentiment d’identité sont à la fois complexe et compliqués. Parfois des gars straight aiment baiser avec d’autres mecs (là-dessus, cet article en anglais sur les hommes principalement straight est intéressant) et parfois des hommes gais aiment le sexe avec les femmes (pour s’en tenir pour le moment à une vision binaire du genre). Tu peux aimer des aspects d’une expérience sexuelle même si tu n’as aucune attirance pour la personne avec qui tu fais ces choses. Peut-être que t’aimes te faire tailler une pipe, peu importe qui la donne. Peut-être que certaines parties sexuelles du corps t’attirent mais que tu n’as aucune attirance pour la personne elle-même à cause de son genre – j’ai vu plusieurs gars décrire ça comme étant leur expérience. Mais ajoute à tout ça la non-binarité du genre ou tout simplement des expressions de genres qui sortent de la norme, puis même les désirs et l’attirance peuvent devenir ambigus et causer de l’ambivalence; on n’a qu’à penser par exemple au gars straight qui a zéro attirance pour les gars mais qui bande devant une drag queen séduisante. Donc c’est possible que ta sexualité refuse de se laisser caser dans une petite boîte et que ce soit difficile de catégoriser tes expériences. Quelles personnes t’excitent comparé à quelles expériences sexuelles te donnent du plaisir peuvent être des goûts qui diffèrent, puis des exceptions inattendues peuvent survenir.

Enfin, la plupart des gars intéressés à avoir du sexe avec des personnes de genres divers vont faire le commentaire que trouver un mec avec qui coucher est en général plus facile (surtout si tu vis dans une ville). Des appli de rencontres pour les hommes qui sont aux hommes, comme Scruff ou Grindr [site anglais, mais l’appli a une version française], ont facilité encore plus la chose. Ça amène certains gars à avoir beaucoup plus de rencontres sexuelles avec d’autres gars qu’avec n’importe qui d’autre et à se questionner sur à quel point ils aiment les personnes d’autres genres, en particulier les femmes – alors que c’est en fait la facilité d’accès aux mecs qui biaise leurs « statistiques ». D’un autre côté, tu vas parfois voir des gars straight qui se cherchent une expérience de plaisir sexuel avec un autre homme – souvent parce qu’ils sont hétéroflexibles ou bicurieux – parce qu’ils trouvent eux aussi que c’est plus facile (surtout avec les appli). Ce sont donc des dynamiques qui peuvent amener des gens à se questionner sur leur sexualité avec le temps.

Source: Wikipedia

Fucké de l’intérieur – l’homophobie et la biphobie intériorisées

Même si l’acceptation de l’homosexualité s’est répandue à plusieurs endroits, la plupart d’entre nous avons grandi avec des parents, des pairs et des média qui présentaient l’hétérosexualité comme la seule orientation acceptable. La plupart d’entre nous avons assisté ou fait face à, ou même infligé, de l’homophobie. La plupart d’entre nous avons appris que ce n’était pas « viril » de coucher avec d’autres hommes. La plupart d’entre nous n’avons jamais vu l’homosexualité ou la bisexualité comme quelque chose à valoriser et à chérir. En plus, tandis qu’on est de plus en plus à l’aise avec les gens qui sont exclusivement homosexuels, plusieurs croient que ce n’est pas correct d’être attiré par plusieurs genres – qu’on est censé pour une raison quelconque de n’en « choisir » qu’un, de nous « brancher ». Plusieurs d’entre nous qui sortent du placard comme bisexuels vivent une pression explicite d’abandonner et de « juste admettre » qu’on est gais et qu’on était « dans le déni ».

Tout ça, c’est de la marde.

C’est de la marde qui a la peau dure par contre et c’est probablement en train de te fucker de l’intérieur en ce moment même. Cette marde-là est présente dans ces moments que tu remets en question ta virilité à cause de tes désirs pour d’autres gars ou du sexe que t’as avec eux. Elle est dans la honte post-orgasmique que tu ressens après t’être permis de coucher avec un autre homme (ou de fantasmer de le faire). Elle est dans le désir de paraître straight ou de baiser juste avec des gars hétéro ou bicurieux – mais pas avec quelqu’un qui assume son côté homo. Elle est dans ces moments où tu passes des commentaires homophobes sur un gars qui est « trop efféminé » our « trop gai ». L’homophobie intériorisée, c’est ça. Mais il y a aussi la biphobie intériorisée : quand t’as des moments de doute par rapport à ta propre sexualité, même quand tu sais depuis des années que tu tombes en amour et que t’aimes le sexe avec des personnes de genres différents; quand tu te dis que ta sexualité n’est pas des affaires des autres, bien qu’il y ait une face très publique à l’hétérosexualité et à l’homosexualité de ceux-ci; quand tu dis que tu préfères ne pas te mettre d’étiquette parce que dans le fond le mot « bisexuel » te repousse un peu (ça peut être légitime de rejeter les étiquettes, mais il y a un stigmate rattaché au mot « bisexuel » qu’on peut avoir intégré); ou bien quand tu rejettes la visibilité ou le militantisme d’autres personnes bi, pan ou polysexuelles parce que « ça dérange ». Il y a une ligne mince entre choisir de ne pas dévoiler ton orientation sexuelle pour te protéger des mauvaises réaction ou de l’hostilité des gens (100% legit) et entre le faire parce que t’as commencé à croire (souvent sans t’en rendre compte) que ta sexualité n’a pas le même poids que celle des autres. La minceur de cette ligne contribue aussi à entretenir la biphobie intériorisée.

Venant d’un angle différent, tu peux en venir à dire que t’es gai juste parce qu’on t’achale moins comme ça et qu’il y a moins de jugements. Tu peux même en venir à croire toi-même que dans le fond, t’es gai. La bisexualité de transition – s’identifier comme bi un bout de temps avant de réaliser que t’es vraiment gai – ça existe. À cause du monosexisme par contre – le préjugé qu’être attiré par un seul genre est plus valide qu’en être attiré par plusieurs – les gens font des suppositions pas cool. Ils supposent que le voyage de découverte de sa sexualité d’un gars finit le moment qu’il « avoue » enfin qu’il est gai. Ce gars devient prétendument un monosexuel – une personne attirée par un seul genre – et l’ordre est rétabli. Mais personne ne parle du moment où il finit par coucher avec une de ses chums de filles ou un-e de ses potes non-binaires et que sa vision de sa propre sexualité change à nouveau. Parfois, quand des gens qui disaient être gais déclare tout d’un coup être bi, certains de leurs amis gais peuvent les rejeter. Ça ouvre la porte à toutes sortes de feelings dégueux auxquels ils doivent faire face.

Je parle de tout ça parce que l’homophobie et la biphobie – tant celle des autres que celle que t’as intériorisée – t’empêche probablement de te voir comme t’es réellement, puis de t’accepter et de t’aimer tel que t’es. Alors laisse-moi te dire quelque chose d’important, parce que c’est peut-être la première fois que quelqu’un va te dire ça.

Ton pouvoir mutant

Ta sexualité fait partie de ce qui te rend unique, spécial et digne d’être aimé. Tu mérites qu’on t’accueille, qu’on te soutienne, qu’on prenne soin de toi et qu’on t’aime. Tu mérites ces choses non pas malgré ta sexualité, mais bien avec elle y compris. Elle fait partie de toi en tant que personne complète et quelqu’un qui choisit de t’aimer devrait aimer la personne au complet que tu es. Ton orientation sexuelle – que tu sois bisexuel, polysexuel, pansexuel ou un peu plus flexible que l’hétérosexualité ou l’homosexualité rigide – te donne un point de vue que les autres n’ont pas et c’est ton trésor. C’est littéralement ton pouvoir mutant : t’as la capacité unique d’être attiré par plusieurs genres et de ne pas être pogné à n’en aimer qu’un seul. Tu ne te sens peut-être pas comme ça en ce moment, mais ta sexualité est une des choses les plus extraordinaires à propos de toi. La société t’a appris à en avoir honte, mais si on vivait dans un monde moins fucké, tu tripperais comme un bon de savoir qu’il y a quelque chose comme ça qui te rend spécial. Si tu t’accroches et que tu te bats pour ton droit d’être toi-même, il y aura un jour où tu pourras ressentir cette joie.

La fluidité sexuelle

La sexualité est fluide : elle change et elle évolue. Pendant un certain temps, il se disait des conneries comme quoi la fluidité sexuelle n’était vécue que par des femmes. Pour être juste, Lisa Diamond, une des principales chercheuses sur ce sujet, a changé d’idée quand de la nouvelle recherche a démontré que les hommes aussi vivaient de la fluidité sexuelle [article en anglais]. Qu’est-ce que tout ça veut dire pour toi? La façon dont tu te sens par rapport à la sexualité en ce moment ne sera peut-être pas la même dans quelques années et pourrait changer à nouveau encore plus tard. Je ne suis pas en train de dire que tes attirances envers d’autres gars vont s’en aller; elles sont là pour rester. Aussi, si t’essaies de les refouler, elles vont revenir plus fortes que jamais – les émotions détestent qu’on les refoule. Mais ce que je te dis c’est que la force de tes attirances pour chaque genre peut fluctuer. Pour certains gars, c’est une évolution très frappante; pour d’autres, elle est subtile. Mais ça veut aussi dire que si les choses sont déroutantes en ce moment, elle finiront par devenir plus claires. Donc c’est correct de te donner le temps d’apprendre à mieux te connaître et de te laisser de la place pour grandir au travers de tout ça.

Source : Flickr

Ton sentiment d’identité peut évoluer lui aussi. Comme je l’ai mentionné plus haut, il y a des gars qui sortent d’abord du placard comme bi et qui finissent éventuellement par dire qu’ils sont gais. Moi-même j’ai fait ça. Avec le temps, je me suis rendu compte que j’étais attiré plus facilement par les hommes que par les femmes et que je ne tombais en amour qu’avec des mecs. Aussi, j’étais bénévole pour donner des ateliers dans les écoles sur l’homosexualité et il existait une pression de la part de l’organisme de dire que j’étais gai; j’ai commencé à croire ce que je disais aux élèves (pour être juste, c’était dans les années 2000 et la position de l’organisme en question a évolué depuis). Ça coïncidait avec une période de ma vie où mes attirances envers les femmes étaient plus faibles, à cause de ma fluidité sexuelle et du manque d’opportunités de me retrouver au lit avec des femmes. Mais après quelques années de ma « phase » gaie, j’ai recouché avec une femme et j’ai trippé comme un bon. J’ai  réalisé à quel point ça m’avait manqué sans que je le réalise et je me suis mis à en revouloir. J’ai donc recommencé à m’identifier comme bisexuel. Alors tu te sens peut-être bi en ce moment, seulement pour sortir du placard comme gai plus tard. Peut-être que les choses en resteront là; la découverte de soi prend toutes sortes de chemins et parfois t’as besoin de croire que t’es bi avant de réaliser que t’es gai. Mais ne pense pas que c’est la fin de ton histoire juste parce que t’en ai à l’étape gaie de ta vie. Tu vas peut-être réaliser qu’en fin de compte t’aime bien t’envoyer en l’air avec tes chums de filles. 😉

Et l’amour, dans tout ça? – L’orientation amoureuse

Maintenant, l’attirance sexuelle c’est une chose: il s’agit de qui te fait bander et de qui fait de toi une bête lubrique. L’attirance amoureuse est une chose différente par contre: il s’agit d’avec qui tu tombes en amour. Les attirances sexuelles et amoureuses vont souvent main dans la main, mais pas toujours – en particulier quand t’es bi, pan ou polysexuel. Par exemple, t’es peut-être attiré sexuellement par plusieurs genres, mais pour ne tomber en amour qu’avec du monde d’un seul genre. Ou bien t’es attiré par un seul genre, mais c’est avec des personnes d’un genre différent de celui-là avec qui tu tombes en amour – j’ai vu des gars qui décrivaient ça comme leur expérience, de tomber en amour avec des femmes mais de n’être attiré que par les hommes ou vice versa.  Ou encore tu ressens de l’amour romantique aussi facilement que tu es attiré sexuellement par des gens, peu importe ce qu’ils ont entre les jambes. C’est pourquoi on ne parle pas seulement d’orientation sexuelle, mais aussi d’orientation amoureuse. Je vais parler de toutes ces identités plus loin, mais je voulais que tu saches que tu peux faire l’expérience de ta bisexualité de toutes sortes de façons et que tu gardes le droit de te dire bisexuel si tu le veux, même si tes sentiments amoureux ne vont pas dans ce sens.

Source : Pxhere

« Mais je choisis de m’appeler comment? » – Les crisse d’étiquettes

Tout ça nous amène à la question des étiquettes. Ces jours-ci, certaines personnes sentent qu’elles ne devraient pas se mettre d’étiquettes. On peut voir pourquoi – la sexualité, c’est compliqué et ça l’est encore plus quand t’es attiré par plusieurs genres. C’est facile de sentir qu’une étiquette ne vient pas à bout de résumer qui tu es, surtout quand tu évolues continuellement. Mais refuser de t’étiqueter peut devenir une échappatoire. Comprends-moi bien : j’ai moi aussi eu des difficultés avec les étiquettes pendant longtemps. J’ai passé par m’identifier comme bi, queer, gai, bi à nouveau, fluide, puis polysexuel (un mot qui n’existait pas à mes débuts). Mais je déteste quand une célébrité évite la question de sa sexualité avec des platitudes du genre de « ma sexualité, ce n’est pas des affaires des autres » ou de « je ne veux pas me mettre d’étiquettes ». Il s’agit d’une question de politique et de pouvoir dans notre société. Hétéro, straight, lesbienne, homo, gai : ce sont les étiquettes dominantes. Si tu t’étiquettes de cette façon, peu de gens diront que ta sexualité n’existe pas vraiment. La société reconnaît les monosexuels, même s’il y a encore de l’homophobie à plusieurs égards. Mais une vague de changement est en train de survenir. Les étiquettes se multiplient. Les gens veulent des mots qui collent à leurs réalités, alors ils les inventent. Il y en a qui n’aiment pas ça, parce qu’ils n’aiment pas la ribambelle d’étiquettes qui vient avec ce phénomène. Mais c’est aussi excitant de voir toute la diversité qui existe dans les identités et les sexualités des gens. Ce n’est pas toujours simple : par exemple, j’utilise autant le mot bisexuel que polysexuel. Bisexuel est une étiquette simple que les gens comprennent sans explication. C’est une étiquette vaste derrière laquelle plusieurs d’entre nous peuvent se regrouper pour affirmer notre existence. Son histoire politique est riche, mais vu que plusieurs personnes la traite comme un mot sale, c’est important de nous la réapproprier. Tandis que pour polysexuel, c’est l’étiquette qui me va le mieux. Mais l’utiliser me force à expliquer ce que le mot veut dire et qu’il existe beaucoup plus que deux genres – ce qui est un sujet avancé pour la plupart du monde quand juste leur annoncer que je suis attiré par les hommes et les femmes (entre autres) est controversé en soi. Donc ni l’une ni l’autre de ces étiquettes n’est une solution parfaite pour moi.

Mais t’en dirais quoi si ton héro personnel disait à la télé : « Oui, je suis bi, pis je m’en crisse de ce que tu penses! » Les mots ont ce genre de pouvoir.

Voici quelques étiquettes qui peuvent être utiles pour un gars qui découvre son attirance à plus d’un genre.

Bisexuel : t’es attiré par les femmes, les hommes et possiblement des personnes d’autres genres.

Polysexuel : t’es attiré par des personnes de plusieurs genres, mais pas nécessairement tous et pas nécessairement par les hommes ou par les femmes.

Pansexuel : t’es attiré par les gens peu importe leur genre.

Hétéroflexible, hétéro mais ouvert : tu te vois comme principalement hétérosexuel, mais tu reconnais que tu aimerais (peut-être) des trucs sexuels avec des personnes autres que des femmes.

Homoflexible, gai mais ouvert : tu te vois comme principalement gai, mais tu reconnais que tu aimerais (peut-être) des trucs sexuels avec des personnes autres que des hommes.

Fluide : tu sens que ton attraction fluctue beaucoup entre les genres.

Asexuel : tu n’as pas de sentiments d’attirance sexuelle pour d’autres personnes, bien que t’aimes peut-être certains actes sexuels; l’asexualité existe sur un spectre diversifié.

Demisexuel : tu ressens de l’attirance sexuelle seulement pour des gens avec qui tu as un lien émotif fort; existe sur le spectre de l’asexualité.

Hétéroromantique: tu tombes en amour seulement avec des personnes d’un genre différent du tien (typiquement un homme avec des femmes ou vice versa)

Homoromantique : tu tombes en amour seulement avec des personnes de ton propre genre.

Biromantique / polyromantique / panromantique: tu tombes en amour avec des femmes, des hommes et possiblement d’autres genres / avec des personnes de différents genres, mais pas nécessairement tous / avec des gens peu importe leur genre.

Aromantique : tu ne tombes pas en amour, bien que tu puisses ressentir d’autres liens affectifs forts; l’aromantisme existe aussi sur un spectre diversifié.

Demiromantique: tu tombes en amour rarement, seulement avec des personnes que tu connais bien; existe sur le spectre de l’aromantisme.

Le question « est-ce que je suis bi? » vient donc de devenir plus compliquée. Es-tu hétéroflexible? Hétéroromantique et bisexuel? Homoromantique et polysexuel? Asexuel et biromantique? Bien sûr, tu peux garder les choses simples et n’utiliser que les mots qui te sont les plus familiers. Bien souvent, juste dire « je suis bi » est bien assez.

Source : Pxfuel

Mais au bout du compte, la chose la plus importante n’est pas les étiquettes : c’est ce que tu ressens pour l’autre être humain juste devant toi.

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Nous lançons le forum francophone r/GarsBi sur Reddit pour les gars bisexuels, bicurieux, pansexuels, polysexuels ou qui se questionnent sur leur orientation. Les gars trans et/ou non-binaires sont les bienvenus. Viens-nous voir pour partager ton histoire et poser tes questions!

Espaces en anglais

Les espaces en français pour les hommes bi+ sont pratiquement inexistants. Il y a cependant quelques forums bien fréquentés en anglais sur Reddit.

Forums sur Reddit:

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